Octobre 2022, nous retrouvons les parents de Quentin pour prendre le ferry à Roscoff : direction Cork, en Irlande. Voilà plusieurs mois que nous parlons de faire un voyage tous les 4, et nous avons finalement décidé de mettre le cap vers l’ouest de l’île irlandaise. Nous passerons d’abord 4 jours dans la région du sud-ouest et ses « rings », ces grandes péninsules sauvages sur lesquels l’océan Atlantique vient s’écraser, taillant la roche brute à force de bourrasques et ressac parfois violent. Depuis Kenmare nous visiterons les Ring of Beara, le Ring of Kerry et le Killarney National Park…
Arrivée en ferry, Cork et sa région
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La traversée depuis Roscoff jusqu’à Cork s’effectue en 13 à 15 heures de navigation. L’énorme navire de Brittany Ferries roule doucement sur la houle alors que nous buvons notre première bière sur le pont où se trouve le bar. Une vieille carte IGN de 1994 dépliée sur la table entre nous quatre, nous étudions un tracé surligné en rouge. Il s’agit du parcours qu’on suivi Sophie et Pascal, les parents de Quentin, lorsqu’ils ont voyagé en Irlande avec des amis à bord d’un petit camping-car brinquebalant.
28 ans nous sépare de leur souvenirs, et pourtant les anecdotes fusent déjà ! Nous décidons néanmoins de ne pas suivre strictement leur parcours et de se laisser la liberté de découvrir tout ce qui nous fera envie. La mer se lève assez brusquement, et le ferry se balance maintenant d’avant en arrière. L’eau disparait alors que la proue du bateau se dresse vers le ciel du sommet de chaque vague, puis pique d’un coup vers le bas plongeant dans le creux des vagues. Le fish’n’chips avalé au restaurant un peu plus tôt suit le même parcours dans nos estomacs…
La petite cabine dans laquelle nous passons la nuit est spartiate, mais suffisamment confortable pour réussir à dormir, si tant est que l’on réussisse à trouver le sommeil entre les secousses du navire et les ronflements alternés qui couvrent les craquements de la coque.
Au petit matin nous découvrons la côte irlandaise avec ses maisons colorées. Le débarquement terminé, nous effectuons une étape à Cork que nous visitons hâtivement. Peu charmante de prime abord, nous découvrons néanmoins quelques rues commerçantes animées et sympathiques, le superbe English Market (marché couvert où se vendent toutes sortes de mets aux odeurs alléchantes), de belles fresques de street-art et la charmante abbaye de Saint Fin Barre’s.
Depuis Cork nous prenons la route vers Kenmare où se trouve notre premier bed and breakfast. Il est encore tôt, nous prenons alors la décision de passer par les petites routes longeant plus où moins la côte pour commencer à découvrir les beautés de l’Irlande. Première étape, les ruines d’une ancienne église et son cimetière attenant. Les premières d’une longue série… L’Irlande est en effet jonchée de ruines d’églises, de cimetières, et de châteaux, qui ponctuerons notre voyage. Ici c’est Timoleague Friary, les restes d’une abbaye franciscaine du moyen âge, et la plus grande ruine de la région ouest de Cork. Construite sur les rives d’un bras de mer, elle offre de belles vues depuis ses fenêtres et apporte un côté lugubre lorsqu’on l’observe depuis les marais en contre-bas.
Premières ruines, première visite, premier « arrêt photo », l’excitation est à son comble ! Après en avoir exploré tous les recoins, nous reprenons la route vers Clonakilty, puis Skibbereen, deux petits ports de pêche, avant de remonter vers Kenmare. Nous laissons temporairement la côte pour alors découvrir les paysages verdoyants des collines irlandaises…
En route vers Kenmare
Nous empruntons la N71 pour remonter vers Kenmare. Cette petite route nationale a des airs de départementale de chez nous. Nous apprenons vite qu’ici les limitations de vitesses indiquées par les panneau de signalisation sont données uniquement à titre indicatif. Il est impossible de rouler à 80km/h sur une infrastructure routière de la sorte : bosses, fissures et zigzags nous secouent régulièrement. Et quand le bitume est plat, il n’est pas suffisamment large pour nous permettre d’enfoncer la pédale d’accélérateur. Cela dit, bien que nous roulions à vitesse tout à fait modérée, Sophie sursaute à chaque apparition d’un véhicule à moins de 500m du notre… Cela ne présage rien de bon pour son cœur et notre patience, car nous sommes sur un axe majeur et la carte indique des routes bien plus petites.
La N71 permet de passer du County de Cork au County de Kerry. Pour cela elle passe par le Caha Pass, un cahot rocheux à environ 330m d’altitude au milieu duquel serpente la nationale. Depuis ces hauteurs, s’ouvre un paysage grandiose sur les criques en contrebas d’un côté, et les immenses collines verdoyantes de l’autre. Le ciel, tantôt céruléen, tantôt couvert d’épais nuages noirs, contraste la scène tel un tableau de maître.
Ring of Beara
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Le Ring of Beara est la première (ou la plus au sud) des trois péninsules nommées « Ring of … » du sud-ouest de l’Irlande. Depuis Kenmare, nous repassons le Caha Pass dans l’autre sens pour rejoindre Glengarriff d’où nous bifurquons dans le Ring of Beara. Nous laissons rapidement la côte pour nous enfoncer vers le cœur de la péninsule sur une petite route qui nous mène au centre d’une large vallée d’herbe jaunie, encerclée de collines rocheuses où coule une petite rivière. Le paysage est de toute beauté. Les moutons en liberté broutent sans vergogne dans cet environnement paradisiaque pour leur genre. Cela nous remémore notre voyage en Nouvelle-Zélande !
Alors que nous prenons de la hauteur, nous constatons à quel point la route se tord pour suivre les méandres de la roche, nous permettant ainsi de nous élever vers Healy Pass d’où se dégage un nouveau panorama : un large lac d’un bleu intense en premier plan et un bras de mer cerclé de montagnes verdoyantes en arrière plan. Nous sommes immédiatement sous le charme…
Nous faisons demi-tour pour rejoindre la côte et continuer notre périple autour du Ring of Beara. S’enchaîne alors devant nos yeux des prés d’un vert saturé quadrillés par d’anciens murets de pierre et plongeant dans la mer, les collines d’herbe jaune réfléchissant l’éclatante lumière du soleil, ou encore des petites anses dans lesquelles l’océan vient délicatement déposer des vaguelettes en un petit clapotis régulier. Rapidement, alors que le jour baisse, la lumière se colore d’une douce teinte de rose et de violet. Le mélange de couleurs des panoramas côtiers est presque irréel. Alors que nous nous rapprochons de Kenmare le soleil nous offre un coucher flamboyant dont nous profitons avant de rejoindre la chaleureuse ambiance d’un pub…
Ring of Kerry
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Nous partons ce matin sous une météo plus que clémente. Il fait presque chaud ! Le vent nous fera rapidement changer d’avis, mais les premiers arrêts effectués dans notre boucle du Ring of Kerry se font sous le soleil. A l’instar de Ring of Beara, nous suivons le littoral et progressons dans un univers marin à la fois empli d’une sérénité certaine tout en nous rappelant constamment que Mère Nature est la seule maîtresse sur ce monde. Lorsque nous sommes encore « proches » de Kenmare, nous trouvons ci et là de petites anses où dorment de frêles esquifs sur un miroir d’eau. Plus loin, les baies s’ouvrent et laissent place à un spectacle plus large : dunes jaunies, ruines de pierre sur banc de sable, ou encore un ancien cimetière « les pieds dans l’eau ».
Sur la pointe ouest du Ring of Kerry, le décor devient nettement plus minéral. L’océan a taillé une côte déchiquetée à force de plusieurs millions d’années de marées et tempêtes. L’un des points les plus touristiques de la péninsule est en effet le joyaux de ce long travail de sculpture brute : les Cliffs of Kerry. Des falaises acérées plongeant dans l’écume des vagues 305 mètres plus bas. Au large, se dessine la silhouette de deux petits îlots que tous les touristes pointent du doigt. Il s’agit de Skellig Islands. Sur l’une d’entre elles, se trouve les restes d’un monastère du VIème siècle. Les moines y vivaient dans de petite huttes rudimentaires de pierres plates en forme de nid d’abeille. Aujourd’hui classées à l’UNESCO les îles abritent des colonies d’oiseaux et peuvent se visiter en été, moyennant un beau billet, et une réservation 6 mois à l’avance. En effet, elles sont devenues très célèbres depuis qu’elles ont servi de lieu de tournage pour l’île de Luke Skywalker dans la dernière trilogie des Star Wars…
Nous terminons notre « boucle » sur le Ring of Kerry par la côte nord, puis décidons de rentrer en coupant par le centre. La carte indique un grand lac : Lough Caragh puis de minuscules routes qui redescendent vers Kenmare. Nous nous enfonçons alors dans une campagne profonde, traversons une région veinée de rivières qui semble être le royaume de la pêche à la truite, puis les routes se rétrécissent de plus en plus et nous prenons un peu de hauteur. Nous arrivons soudainement à Ballaghbeama Gap, un corridor de roche donnant l’illusion que nous sommes en pleine montagne, ou même dans Jurassic Park ! Le décor nous rappelle certains passages de notre trek dans les Balkans. Bien que nous doutions que le trafic soit dense sur cet axe, les moutons qui semblent y avoir élu domicile n’ont pourtant pas l’air plus troublés que cela par notre présence.
Le Killarney National Park
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Le Killarney National Park est le premier parc national d’Irlande fondé en 1932. Sur plus de 10 000ha il est composé de trois grands lacs de plusieurs montagnes et d’une biodiversité variée. Depuis toutes ces années que Sophie et Pascal nous parlent de leur voyage en Irlande d’il y a 28 ans, un nom ressort constamment : Ladies View. C’est un souvenir visiblement marquant. Ça tombe bien, c’est justement sur la route entre Kenmare et Killarney. Ce point de vue offre un panorama a couper le souffle sur les lacs du Killarney National Park, c’est l’un des endroits les plus photographiés d’Irlande, et on comprends vite pourquoi !
Un peu plus tard, la route suit les grands lacs et s’enfonce dans une forêt dense et très, très, TRÈS humide… La terre est particulièrement détrempée aujourd’hui, et pour cause : il pleut des cordes ! La majestueuse canopée des grands arbres, probablement plusieurs centenaires, ne suffisent pas à nous abriter des lourdes goutes de pluie. Nous ne nous démontons pas et faisons escale pour une mini ballade le long d’une charmante rivière au bout de laquelle se trouve Torc Waterfall. L’important débit d’eau témoigne du climat météorologique qui règne dans la région.
Nous continuons notre route vers un point entouré sur la vieille carte IGN, dont les parents n’ont plus aucun souvenir : Muckross House. Il s’agit d’un manoir Tudor de 65 pièces construit en 1843 par le député du Kerry County de l’époque. Aujourd’hui transformé en musée, il est possible d’en faire une visite guidée. L’accès au jardin est quant à lui gratuit. Il contient un magnifique arboretum et est particulièrement réputé pour sa collection de rhododendrons, d’hybrides et d’azalées. Le Killarney National Park à d’ailleurs été créé initialement à partir d’une donation d’une partie des terres du domaine.
Non loin nous rejoignons Muckross Abbey, l’un des principaux sites ecclésiastiques du comté. Bâtie en 1448, elle est saccagée et reconstruite plusieurs fois jusqu’en 1652, année en laquelle elle finira par être brulée. Ses ruines sont aujourd’hui en très bon état, et présente une particularité architecturale : son cloître voûté romano-gothique normand, construit autour d’une cour intérieure au centre duquel pousse un if plusieurs fois centenaire… comme c’était le cas près de chez nous en Normandie, dans l’abbaye de Jumièges.
Enfin, pour terminer cette belle journée de promenades dans le Killarney National Park, nous mettons le cap vers une vallée, qui passe entre deux montagnes du parc, au fond de laquelle coule une belle rivière formant cinq lacs : The Gap of Dunloe. Cette minuscule route est visiblement uniquement accessible aux locaux, malgré le fait que les irlandais a qui nous en avons parlé ne semble pas vraiment en accord avec cela. Quoi qu’il arrive, en arrivant sur place la route est clairement bloquée par des muletiers qui, bien évidemment, vous proposent leurs services pour vous faire une balade en carriole ! Vous pouvez bien évidemment traverser le Gap of Dunloe à pieds en suivant la minuscule route. Comptez moins de 1,5km pour rejoindre le premier grand lac et son joli petit pont en pierre, et environ 6km pour arriver l’autre côté (donc le double en comptant le retour !). La lumière de fin d’après-midi est presque divine. De puissants rayons dorés viennent illuminer cet incroyable décor digne du Seigneur des Anneaux.
Nous restons là un moment, sur ce banc face aux roches abruptes des montagnes et la surface argentée du lac. Une belle manière de clôturer ces 4 jours de séjour dans la région de Kenmare. Demain nous prendrons la route vers le nord pour rejoindre les fameux lacs du Connemara.
Les Shoes
Beaux souvenirs, belles photos (presque aussi bien que les miennes 🙂 ….)
et qu’est ce qu’on est beaux….!!!!
bisous
Magnifiques paysages et photos !
A quand la suite de ce carnet de voyage ? Je suis impatiente de vous suivre dans le Connemara…!
Merci Natacha ! 🙂
Les autres articles sont en cours de rédaction, mais on manque de temps pour y travailler…
On espère pouvoir en sortir un dans les prochaines semaines.