Alamut, la vallée des assassins, haut lieu de la randonnée en Iran : des sommets enneigés, des vallées verdoyantes à couper le souffle, des canyons majestueux, des petits villages perchés à flanc de montagne, un château vieux de plus de 1000 ans, et des légendes d’assassins…
La vallée d’Alamut, paradis perdu au cœur des montagnes
Située à environ 100km de Téhéran, il faut pourtant compter de longues heures de route pour s’y rendre. Un bus depuis Téhéran vous mène en 3 heures jusqu’à Qazvin (قزوین), puis il faut encore compter environ 4 heures de routes vertigineuses et de cols pour vous enfoncer dans le massif de l’Alborz (البرز) jusqu’à la fameuse vallée d’Alamut (الموت – alamōt).
Voyez vous donc : une randonnée dans un tel paradis ça se mérite mes bons amis !
L’Albroz, c’est cette chaine montagneuse qui se situe au sud de la mer Caspienne, qui s’étend de l’Azerbaïdjan jusqu’au Turkménistan et l’Afghanistan, et qui abrite les plus hauts sommets d’Iran, dont le Mont Damavand (5671 m). Ce sont ces montagnes que nous avons pu observer depuis le centre de Téhéran lorsque nous avons visité la capitale. Et oui, c’est là que nous voulons aller traîner nos godasses pour une petite nuit de bivouac sur les hauteurs !
Voilà, maintenant que vous êtes incollables sur la géographie iranienne, reprenons notre longue, que dis-je, très longue route !
Le château des assassins de Gâzor Khân
Voilà des heures que nous roulons au travers de paysages toujours plus magnifiques les uns que les autres, faisant étape de temps à autre pour se siffler un bon thé chaud, quand nous débarquons soudainement face à un énorme promontoire rocheux illuminé par une trouée de lumière divine perçant l’épaisse couche de cumulos menaçants. Notre chauffeur pointe son doigt en sa direction tout en s’exclamant : « Gâzor Khân ! Alamut Castle ! »
Plantée à 2100m d’altitude au sommet du promontoire rocheux, le château des assassins est réputée imprenable ! Nous comprenons maintenant le choix de la puissante secte des Nizârites qui y installa son QG il y a plus de 1000 ans. Cette secte, secrète et mystique, format une partie de ses disciples aux arts de l’espionnage et de l’assassinat. Ainsi elle régnât en maître sur la région avec 23 forteresses ! Leur pouvoir s’étendit même jusqu’en Syrie où ils achetèrent d’autres places fortes, dont la célèbre forteresse de Masyaf. Bien qu’aujourd’hui quasiment disparue, cette secte à laissé un héritage fort dans la culture moderne, notamment dans plusieurs films, livres et en ayant inspiré le jeu vidéo Assassin’s Creed.
Mais revenons à notre excursion. Il est vrai qu’un cours de géographie suivit d’un cours d’histoire c’est beaucoup pour un seul carnet de voyage !
Notre taxi s’arrête à l’entrée du village de Gâzor Khân juste au pied du château des assassins. Sur un vieux bout de papier, il griffonne un numéro de téléphone à appeler demain matin, un autre taxi viendra nous récupérer. Un petit homme vient à notre rencontre aussitôt. Il gère un hôtel et nous invite à réserver une chambre chez lui. Nous lui expliquons que nous souhaitons randonner. Notre amie Maryam nous a indiqué qu’elle venait souvent par ici avec son club de randonnée pour aller marcher dans les montagnes. Mais l’homme nous soutient qu’il n’y a pas de sentiers ici, seulement le château des assassins et un canyon. Nous insistons et laissons comprendre fermement à l’homme que ce soir c’est camping ! Désespéré l’homme abat sa dernière carte :
– La montagne c’est dangereux, il fait froid la nuit !
– Mais c’est que nous connaissons un chouilla la montagne et le trek voyez-vous mon cher, nous sommes équipés !
– Et les loups alors ! Ils pourraient vous manger dans votre sommeil ! Il y a plein de loups ici vous savez !
– … Huum oui, d’accord. On s’en occupera. Au revoir monsieur !
C’est ainsi que notre plan fût élaboré : prendre de la hauteur en montant sur la forteresse et observer les lieux de là-haut pour repérer une piste. De la forteresse en elle-même, nous ne verrons pas grand chose. Les ruines, très largement endommagées par un tremblement de terre de 2004, sont en restauration et se cachent derrière une barrière d’échafaudages. Il faudra revenir lorsque les travaux seront achevés ! Par contre nous repérons un chemin qui serpente autour de la vallée en contrebas et qui remonte vers une belle esplanade d’herbe bien grasse et bien verte vu d’ici. Un parfait emplacement pour bivouaquer et ainsi passer la nuit avec une vue sur la vallée !
Randonner dans la vallée des assassins
Nous voilà donc partis, le château des assassins dans notre dos, marchant sous le regard des sommets enneigés de l’Alborz. La piste nous mène sur le flanc opposé de la vallée des assassins, nous offrant une belle vue sur le pic rocheux que nous venons de quitter. Rapidement, nous descendons dans un petit vallon caché que nous n’avions pas pu identifier depuis les hauteurs. Les nuages s’écartent l’espace d’un instant, laissant le soleil venir lécher le paysage d’une lumière dorée et offrant ainsi une tout autre vision de ce paradis caché. En bas, un homme fait paitre son âne paisiblement. Nous nous croisons sans un mot. Une brève inclinaison de la tête et nos regards suffisent à transmettre nos salutations respectueuses sans briser le silence de la montagne. Notre terrain de camping se trouve en hauteur de l’autre côté de la vallée, il faut que nous trouvions un moyen de remonter !
C’est en descendant au fond du vallon que nous rencontrons le casse-tête : un cours d’eau glacée au courant puissant. Trop large pour sauter, trop profond pour y jeter des rochers sur lesquels marcher. Trop dangereux de tenter une quelconque traversée avec nos sacs à dos bien trop lourds pour ce genre d’exercice d’équilibristes. Ce n’est pas le moment de se blesser, nous sommes à des heures de la première ville ! Adrien passera à gué, sans son sac, avec l’espoir de trouver de quoi nous faire traverser de l’autre côté. Il reviendra avec un tronc d’arbre sur lequel Quentin jouera les funambules en faisant des aller-retours, chargé des sacs à dos.
Notre bivouac est enfin installé alors que le soleil illumine l’herbe de ses derniers rayons. Nous avons préparé un foyer et du petit bois pour prolonger la magie de cette journée autour d’un petit feu qui crépite sous les étoiles. C’est exactement ce moment que choisit Adrien pour nous interpeller l’air inquiet :
– Et les loups ? Comment allons-nous faire ? Pensez-vous vraiment qu’il était sérieux, cet homme tout à l’heure ? Je ne suis pas totalement rassuré !
A l’heure de se coucher, Quentin imite le loup depuis notre tente. Il reçoit en retour de la part d’Adrien un magistral « Ta gueule, ducon !« . Fou rire général.
Les canyons d’Alamut et Evan Lake
9h du matin, nous sommes au pied du château des assassins à l’entrée de Gâzor Khân. Notre taxi n’est pas là. 1h30 plus tard notre homme se pointe ! Il se fend en excuses : nous nous étions mal compris et il était parti nous attendre ailleurs. Il parle très bien anglais, et se vante d’être LA référence en termes de chauffeur dont il faut absolument louer les services dans la vallée d’Alamut. Il a même un carnet dans lequel chacun de ses clients laisse un mot dans sa langue natale et en anglais ! Il nous emmènera visiter une vallée voisine ouverte par une série de canyon béants. Il y a deux jours, il a déposé 3 allemands ici qui sont partis plusieurs jours en randonnée ! C’est vrai que ça a de la gueule… On prendrait bien nous aussi quelques jours par ici !
Enfin, notre pilote tient absolument à nous emmener manger un kebab à Evan Lake. C’est ici qu’il est né et qu’il a grandi ! Evan Lake est un grand lac bleu dans lequel se reflètent des sommets à plus de 4000m ! Les iraniens ont aménagé une petite base de loisir sur les berges, et du village partent d’autres randonnées grimpant vers les neiges éternelles ! Tiens, il faudrait aussi prendre quelques jours de plus pour aller crapahuter par là-haut ! Mais nous n’avons pas le temps, nous devons rejoindre notre amie Maryam à Rasht le soir même. Nous nous promettons de revenir, il y a tant de beautés à voir dans ces vallée enchanteresses…
Infos pratiques :
- Le bus pour Qazvin part du terminal ouest de Téhéran, non loin de la tour Azadi. Il y a un bus toutes les 30mn. Le voyage coûte 80 000 Rials (en 2017) et dure entre 2 et 3 heures selon le trafic voir plus. Il vous déposera juste à l’entrée de Qazvin près d’un grand rond-point avec un monument au milieu. Sur le côté du rond point se trouve une station de taxis prêt à vous emmener directement vers la vallée d’Alamut.
- Il est également possible de prendre un train jusqu’à Qazvin, mais nous n’avons pas utilisé cette option. Vous trouverez toutes les informations (en anglais) sur ce site.
- A Qazvin, pour vous rendre dans la vallée d’Alamut, l’option la plus répandue est celle du taxi. Mais cela à un coût élevé : comptez environ 50€. Comptez un petit extra pour vous rendre en plus aux canyons et à Evan Lake.
Le chauffeur qui nous a ramené de là-haut, qui parle anglais et qui connait bien le coin, est M. Mirzaiy. Son téléphone en 2017 était : 09191871997. - Il semble qu’il y ait un bus local qui puisse vos emmener à Gâzor Khân, mais les locaux ne sont pas très enclins à vous donner l’information. Nous n’avons nous même d’ailleurs pas plus d’informations à ce sujet.
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